par Sophie MAXENCE
« Pour l’amour des chats » : une vie dévouée aux animaux
La fondatrice de l’École du Chat Libre du Parisis partage dans un livre, l’histoire de la création de son association et nous plonge au cœur des évolutions de la prise en charge des chats des rues en France.
L’histoire de l’École du Chat Libre du Parisis, située dans le Val-d'Oise (95), nous renvoie à un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Avant la création et la reconnaissance par la loi du statut de chat libre, de petites associations composées de bénévoles courageux et déterminés, faisaient face à la misère féline dans un environnement où tout était encore à construire, à expérimenter. « C’est en connaissant ce passé que l’on peut s’engager avec conviction dans la continuité de ce qui a été fait » croit ainsi profondément Liliane Krauskopff, fondatrice, en 1992, de l’association de l’École du Chat Libre du Parisis et actuelle et présidente d’honneur.
Cette pionnière de la protection des chats des rues a ainsi accepté, à la demande d’Evelyne Casimir-Millan qui lui a succédé à la tête de la structure, de partager son parcours. En résulte un ouvrage de 100 pages intitulé Pour l’amour des chats *, qui est à la fois la mémoire de l’association et un riche témoignage de terrain retraçant les évolutions de la protection animale et ses différents combats.
Les débuts des opérations de trappage
Pour Liliane Krauskopff, tout a commencé dans les années 1980 par la découverte d’une population de chats errants autour du marché de la Frette-sur-Seine. Décidée à venir en aide à ces animaux, elle apprend en autodidacte les « bases » du sauvetage des félins errants : le nourrissage, les soins des animaux accidentés ou malades (atteints entre autres du coryza) et bien sûr la stérilisation qui apparaît très vite comme une urgence. « Sans expérience et sans argent, je suis un peu seule face à ce problème » se remémore Liliane Krauskopff dans son livre. Blanchette, rebaptisée plus tard Câline, fut la première chatte trappée et stérilisée par cette grande amie des chats. Après de sérieuses égratignures, l’utilisation de cages de trappage s’avère indispensable. Mais ce type de matériel est encore peu développé. Il faut alors « bricoler » soi-même des dispositifs adaptés, à partir de cages existantes.
Petit à petit, Liliane Krauskopff organise une prise en charge des chats des rues de plus en plus structurée. Sa rencontre avec la secrétaire de Michel Cambazard va alors être décisive. Le photographe fut le fondateur, en 1978, du Comité de défense des bêtes libres du XVIIIème arrondissement, à Paris. L'objectif de cette association était d'assurer la protection des chats du cimetière de Montmartre qui se reproduisaient rapidement, pour leur éviter la fourrière. Afin de donner aux félins la possibilité de vivre librement en ville, Michel Cambazard et des riverains sensibles à la cause animale, se sont engagés à attraper, stériliser et identifier les chats du cimetière, et à les nourrir régulièrement. Cela a non seulement permis de sauver ces chats de l’euthanasie, mais aussi d’améliorer considérablement leurs conditions de vie. Surtout, cette action a « inventé » le concept de chat libre et démontré son efficacité. Il faudra pourtant attendre plus de vingt ans avant que la loi n’évolue à ce sujet …
La naissance du statut du chat libre
Pour Lilianne Krauskopff, sa participation aux réunions du Comité de défense des bêtes libres à Paris lui a permis de « se sentir moins seule ». Échanger avec des personnes confrontées aux mêmes difficultés qu’elle, trouver des solutions collectivement, ou bien encore découvrir l’existence d’un matériel de trappage plus moderne que ce qu’elle pouvait utiliser furent des étapes essentielles dans son parcours au service des chats errants.
En 1984, elle décide de créer à la Frette-sur-Seine un comité affilié à l’École du chat de Paris. Une « grande avancée » même si la route est encore longue et semée d’embûches. « Dans les années 80, aucune loi n’autorise la prise en charge des chats de la rue et le maire, s’il le veut, peut nous interdire de les nourrir » rappelle ainsi Liliane dans son livre. La stérilisation des populations de chats, proposée par le comité de la Frette, reste cependant un argument de taille et le maire de l’époque accepte la présence des bénévoles sur le marché et son parking. Ce sont alors les prémices d’une reconnaissance des actions menées.
Ce n’est qu’en 1999 que les pouvoirs publics entérinent le travail de « dizaines et dizaines de petits refuges et comités » dont dépend « la survie de milliers d’animaux ». Le 6 janvier, une loi relative « aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux » est promulguée. L’article 213-6 concerne directement la question des chats des rues et permet aux maires de faire procéder à la capture des chats non identifiés, sans propriétaires ou gardiens, vivant en groupe dans les lieux publics de la commune, afin de faire procéder à leur stérilisation et à leur indentification. L’existence du chat libre est enfin officialisée.
L’école du chat libre du Parisis aujourd’hui
La « grande histoire » de la protection animale s’entremêle à l’histoire individuelle des associations et de leurs bénévoles. Ainsi, quelque temps avant la création du statut de chat libre, l’année 1992 fut « cruciale » pour le comité de la Frette-sur-Seine qui s’est transformé en association pour devenir l’École du Chat Libre du Parisis. Dans le même temps, la toute nouvelle structure acquière un terrain pour y installer un refuge au profit des chats malades, infirmes, handicapés ou vieillissants.
En 2006, âgée de 74 ans et après une vie dévouée aux chats des rues, Lilianne Krauskopff passe le flambeau à la présidente actuelle de l’École du Chat Libre du Parisis, Evelyne Casimir-Millan. Cette dernière s’inscrit pleinement dans la continuité de son aînée en poursuivent les différentes activités de l’association qui ne manque toujours pas de travail. « Nous intervenons sur toute la région du Parisis, ce qui représente plus de 80 communes, explique la présidente. Elle ajoute : on a toujours besoin de renfort de bénévoles notamment pour l’entretien du refuge. »
Des familles d’accueil sont également recherchées pour étoffer le réseau déjà existant. « Il peut s’agir d’accueil temporaire, ou définitif pour de vieux chats qui finissent leur vie tranquillement, sous haute vigilance » détaille Evelyne Casimir-Millan. Enfin, l’association est toujours à la recherche de nouvelles adhésions et de soutiens financiers. L’acquisition du livre est aussi un moyen de soutenir l’association, tout en découvrant le parcours d’une protectrice des chats hors du commun par sa « ténacité, son courage et sa grande empathie ».
* Prix de vente à 18 euros, et 6 euros de frais de port. Pour contacter l’association, retrouvez son profil ici