par Sophie MAXENCE
Le difficile exercice des collectes en magasin
Essentielles pour recueillir des dons de nourriture et de matériel, la mise en œuvre de ces opérations peut représenter un défi pour les associations qui s’adaptent aux difficultés, comme le manque de bénévoles et la baisse des dons.
« On est un peu fatiguées parce qu'on est trop peu nombreuses. » Nadine, présidente de l'association Apegal, qui œuvre pour la protection des chats libres dans le Pas-de-Calais (62), résume ainsi la difficulté que rencontre de nombreuses associations de protection animale. Le manque de bénévoles, chronique, freine non seulement leurs actions quotidiennes, mais complique aussi l'organisation des collectes de nourriture et de matériel en magasin, essentielles à leur fonctionnement.
Avec un nombre d'animaux à prendre en charge en constante augmentation, les besoins logistiques et financiers des associations explosent. « Plus on stérilise des chats, plus il faut des moyens humains et matériels pour s'en occuper », explique Nadine. Depuis 2012, Apegal a réalisé près de 1 700 stérilisations de félins, la plupart devenant des « chats libres » dont il faut s’occuper tout au long de leur vie. Une telle tâche nécessite des ressources que les dons issus de collectes en magasin peuvent en partie combler, tant il est difficile pour les associations qui ne bénéficient pour la plupart d’aucune subvention, de tout financer.
Un levier pour sensibiliser et recruter
Par ailleurs, les collectes en magasin sont un levier important pour sensibiliser le public aux enjeux de la protection animale et espérer réduire la charge de travail qui repose sur les associations. « C'est l'occasion de parler de la stérilisation et d'expliquer son importance pour limiter les naissances non contrôlées », souligne ainsi Nadine d’Apegal. De plus, ces événements sont des vitrines locales pour les associations, leur offrant une opportunité de recruter de nouveaux bénévoles. « On garde toujours des fiches d'inscription sous la main pour les personnes intéressées à aider », glisse la présidente d’Apegal.
Mais l'organisation de ces collectes reste un défi. Les associations, en manque de bénévoles, peinent à monter des opérations qui pourraient justement attirer de l'aide supplémentaire. « Il faut vraiment courir après les magasins, les appeler plusieurs fois, aller les voir », relate Marion, de l'association Couettes et Croquettes, en Indre-et-Loire (37), qui recueille des dons pour d'autres associations. La logistique peut aussi être lourde : planifier le stand, préparer les flyers à distribuer et surtout mobiliser des bénévoles pour le jour J, souvent un samedi. « Lors de la dernière collecte que nous avons organisée, deux bénévoles ne sont pas venus, sans prévenir, alors qu'on comptait sur eux » témoigne Marion de Couettes et Croquettes.
Des ajustements nécessaires face à la baisse des dons
Un autre obstacle majeur à laquelle sont confrontés les associations est la baisse des dons en magasin liée à l'inflation. « On sent que les gens ont plus de mal », explique Marion. « Lors de notre première collecte avant la crise du Covid, on remplissait facilement 7 ou 8 caddies. Maintenant, si on en remplit 5, c'est déjà bien. »
Pour surmonter ces difficultés, les associations s’adaptent, en privilégiant par exemple des magasins de petite taille qui nécessitent la présence de moins de bénévoles. Certaines espacent aussi leurs collectes pour ne pas surcharger leurs bénévoles, ni les magasins qui veillent parfois à ce que leurs clients ne soient pas trop sollicités. L’association Couette et Croquette souligne cependant que la présence d’association reste bénéfique pour l’association, tant du point de vue de leur image que de leurs recettes. Le choix des lieux de collecte est souvent déterminant. « Les grandes surfaces fonctionnent mieux que les petites animaleries, où les résultats sont souvent décevants », observe Marion. En effet, les grandes surfaces permettent aux clients d'acheter des produits à bas prix, comme les marques de distributeurs, et donc de contribuer plus facilement aux collectes.
Par ailleurs, les opérations de collectes ne se limitent pas aux achats en magasin. C’est aussi l’occasion pour les associations de récupérer du matériel de seconde main déposé par les personnes rencontrées. « Les collectes sont un point de rendez-vous pour les personnes qui nous suivent sur les réseaux sociaux, explique ainsi Marion. Certaines voient sur nos posts Facebook que nous serons présents à tel endroit, telle date, et en profitent pour venir nous déposer des couettes, des draps, des serviettes... Il y a aussi les clients du magasin qui reviennent après leurs courses pour nous apporter des affaires qu’ils avaient chez eux. »
Enfin, les opérations de collecte ont aussi une forte dimension sociale. Au-delà des dons, c’est l’occasion pour les associations de rencontrer des personnes et de créer du lien social autour de la cause animale. « Il y a toujours quelques personnes désagréables qui ne comprennent pas pourquoi on est là mais le plus souvent ces journées de collectes sont sympas, rappelle Marion de Couettes & Croquettes. On peut même passer des moments forts, comme cette rencontre, lors de notre dernière collecte, avec un monsieur qui venait de perdre son chien, on sentait que ça lui faisait plaisir de parler avec nous. »