Article publié le 24 Mai 2022 18:00:00
par Sophie MAXENCE

Comment nouer un partenariat avec une commune pour les chats errants ?

Dotée d’une double casquette d’élue locale et de bénévole d’association de protection animale, Sophie Chergui, fondatrice de SOS Matou de Chanteloup, nous éclaire sur les différentes façons d’amener les mairies à travailler avec les associations.

Sophie Chergui © DR

Sophie Chergui est conseillère municipale déléguée à l’environnement à la mairie de Chanteloup-les-Vignes dans les Yvelines. Sensible à la cause animale, elle a créé une association, SOS Matou de Chanteloup, afin de répondre à la problématique des chats errants de sa commune et à la misère féline qui en découle. Dotée d’une double casquette d’élue locale et de bénévole d’association de protection animale, Sophie Chergui revient en détail sur les différentes modalités que peut prendre un partenariat entre une commune et une association, et l’importance de ce type d’accord.

Rappelons que la question des animaux errants relève de la responsabilité des maires. Ces derniers ont la possibilité, par l’article L.211-27 du code rural et de la pèche, de faire capturer les chats non identifiés afin de les faires stériliser et identifier. Ils peuvent ensuite être relâchés sous le statut de chat libre. La remise de chats sur site permet de fixer une population en bonne santé et évite l’arrivée de nouveaux congénères. Pour cela, les mairies travaillent avec des associations qui s’occupent des opérations de trappage, des soins vétérinaires, le plus souvent à leur propre frais, puis du suivi sanitaire et du nourrissage des chats relâchés. Si la mairie refuse de mettre en œuvre ce type de solution en préférant faire appel à des services de fourrière, elle doit, selon la loi, se justifier. Pourtant, certaines communes se montrent encore réticentes à adopter le principe des chats libres. Le dialogue doit donc se poursuivre entre élus et associations afin de faire évoluer les mentalités.

 

Solidarité-Peuple-Animal : Depuis que vous avez créé votre association, est-ce que d’autres mairies vous ont contactée pour être accompagnées dans la prise en charge des chats des rues ?

Sophie Chergui : Oui, j’ai notamment été contactée par la ville de Strasbourg qui voulait des conseils pour mettre en place un programme de stérilisation, et qui a d’ailleurs par la suite lancé un dispositif de chats libres. J’ai également reçu des appels des villes de Poissy et Chambourcy sur ce sujet.  

Solidarité-Peuple-Animal : Certaines mairies sont donc intéressées pour travailler en lien avec les associations, mais elles ne savent pas toujours comment faire :

Sophie Chergui : Non parce que c’est compliqué, on n’a pas de méthodologie dans ce domaine-là. Il faut connaître la législation, savoir ce qu’on a le droit de faire ou pas. On ne peut pas procéder n’importe comment. Pour une ville qui est confrontée à d’autres problématiques, c’est extrêmement compliqué. Cela est vrai pour les campagnes de stérilisation des chats errants, mais pour tout ce qui concerne les animaux en général. Souvent les municipalités ne savent pas comment faire, et on laisse les gens se débrouiller.

Solidarité-Peuple-Animal : Quelle est l’importance du cadre légal lorsque l’on mène des opérations de trappage ?

Sophie Chergui : Lors de la création de l’association SOS Matous de Chanteloup, une des premières actions de la mairie a été de prendre un arrêté permanent de trappage sur le territoire. C’est important vis-à-vis de la population et des habitants un peu plus réfractaires, à qui on peut expliquer que notre action est autorisée par la préfecture et la mairie. Mais toutes les associations n’ont pas la chance d’être soutenues par leur commune. Souvent elles agissent dans l’urgence avec les moyens du bord. Loin de moi l’idée de les critiquer à condition qu’elles soient sérieuses. La priorité reste le bien-être des animaux.

Solidarité-Peuple-Animal : comment peut-on démarcher sa mairie en tant qu’association ?

Sophie Chergui : La première des choses à faire est certainement de regarder si une mairie a un élu en charge de l’environnement qui sera sans doute plus à l’écoute sur la problématique des chats errants. Après il faut monter un dossier, avec preuves à l’appui sur la misère féline du territoire. Il faut montrer qu’il y a beaucoup de chats errants dont on ne s’occupe pas. Tout le monde ne voit pas les chats comme les bénévoles d’associations. Un élu ne sait pas nécessairement qu’il y a parfois jusqu’à 200 félins à certains endroits. Puis il faut expliquer à la mairie ce que propose de faire l’association et montrer son sérieux. A partir de là, un partenariat est à construire.

Solidarité-Peuple-Animal : Quelles formes peut prendre ce partenariat ?

Sophie Chergui :  Souvent ce sont les bénévoles d’association qui trappent, et si la mairie peut contribuer au financement des campagnes de stérilisation, c’est un vrai plus. A Chanteloup-les-Vignes, les campagnes de stérilisations sont financées à hauteur de 2500 euros par la mairie et 2500 euros par la Fondation 30 Millions d’Amis, ce qui permet de réaliser 70 stérilisations par an. Mais le soutien de la mairie peut aussi passer par une aide en termes de matériel, ou la mise à disposition d’un local. Il y a différents moyens de construire ce partenariat.

Solidarité-Peuple-Animal : quels sont les autres intérêts pour une association de travailler avec une mairie ?

Sophie Chergui : C’est vraiment un gage de confiance et cela montre qu’on est complètement accepté. Chez nous par exemple, la mairie nous aide dans nos actions en publiant nos messages sur les réseaux sociaux ou dans le journal municipal. Ce relais officiel donne du poids et une légitimité à nos actions.

Solidarité-Peuple-Animal : Que peut attendre une mairie de la part d’une association sur ce sujet des chats des rues ?

Sophie Chergui : Une expertise pour résoudre une problématique de souffrance et d’errance animale. C’est important de bien expliquer comment on va procéder et ce que vont devenir les chats. Cela permet de rassurer les élus en leur présentant une solution à un problème. Pour ma part, je milite beaucoup auprès de mes collègues de la mairie pour leur expliquer ce que l’on fait à l’association. Par ailleurs, une commune va bien sûr attendre d’une association qu’elle respecte la loi et les différents lieux, notamment les domaines privés.

Solidarité-Peuple-Animal :  L’action citoyenne peut-elle aider à convaincre des mairies réticentes ?

Sophie Chergui : Oui bien sûr, les gens peuvent interpeler leurs élus ; il faut faire des choses. Aujourd’hui plus que jamais nous sommes dans une époque où les personnes sont beaucoup plus sensibles à la cause animale, c’est évident. Il y a une vraie prise de conscience sur ce sujet qui nous aide aussi dans les dons qu’on peut recevoir en tant qu’association de protection animale.