par Sophie MAXENCE
SOS adoptions : comment favoriser les animaux laissés pour compte ?
Dans les refuges, certains profils peinent à trouver des adoptants. Des dispositifs « coup de pouce » cherchent à leur offrir une seconde chance en agissant notamment sur les frais d’adoption, mais des défis financiers et éthiques subsistent.
Âgés, malades ou dotés de certaines caractéristiques physiques ou physiologiques, de nombreux animaux dans les refuges ou en famille d’accueil peinent à trouver des adoptants. Invisibilisés par des animaux « à la mode » ou plus jeunes – chiots et chatons en tête – ces laissés pour compte souffrent d’une double peine : abandonnés une première fois, ils sont voués à passer le reste de leur vie en refuge ou en association faute d’adoptants. Cependant, des dispositifs « coup de pouce » existent pour aider ces animaux à trouver un foyer.
Une réduction des frais d’adoption
Certaines associations font ainsi le choix d’appliquer des frais d’adoption réduits, à l’instar de la SPA dans le cadre de son dispositif SOS. « Contrairement à une adoption classique, la participation financière dans le cadre d’une adoption SOS est de 60€ (minimum) », peut-on lire sur le site de la SPA. « Cela ouvre un nouveau champ des possibles à nos compagnons injustement en mal d’adoption. » Sur le site de la SPA, un logo spécial SOS accompagne les annonces d’adoption pour les animaux concernés, redonnant de la visibilité aux animaux oubliés.
Dans des situations d’urgence, des adoptions sont même réalisées sans frais, ou presque. Le collectif Urgences Fourrières Bretagne (UFB) a pour objectif « de sauver autant de vies que possible » en sortant les chats errants pour les faire adopter de manière légale et leur éviter l’euthanasie. Quand aucune place n’est trouvée en refuge, l’association, qui dispose d’un statut particulier, réalise des adoptions auprès de particuliers. La fourrière ayant pris en charge l’identification et la vaccination de l’animal, UFB n’applique pas de frais d’adoption mais demande une caution de 200 euros pour la stérilisation. Anne Sophie, présidente d’UFB, explique qu’un entretien est par ailleurs systématiquement mené avec les futurs adoptants, dans lequel la question du budget nécessaire pour l’animal est abordée. « Nous faisons énormément de prévention sur ce point, d’autant plus que nos animaux sortent de fourrières et que nous n’avons que très peu d’informations sur leur passé. Nous recommandons aux personnes de réaliser rapidement un check-up vétérinaire. Il nous est déjà arrivé de refuser des adoptions. Certes, nous sommes dans des situations d’urgence, mais nous ne sommes pas là pour retrouver les chats abandonnés, ni pour mettre les gens en difficulté. »
Des défis financiers et éthiques
La question des frais d’adoption est essentielle dans l’enjeu des adoptions responsables. C’est pourquoi agir sur ce curseur pour faciliter certaines adoptions est toujours délicat. Pour de nombreuses petites associations, réduire ou supprimer ces frais est financièrement difficile, car elles ont déjà investi des sommes importantes dans les soins des animaux. Par ailleurs, les adoptions totalement gratuites posent des problèmes éthiques et pratiques. En témoigne Sophie Chergui, présidente de l’association SOS Matous de Chanteloup, lors d’un débat sur ce sujet proposé par Solidarité-Peuple-Animal sur ses réseaux sociaux : « Je suis contre les adoptions sans frais : Cela donne l’idée que l’animal est “gratuit”. Pourtant, le refuge ou l’association ont dû le nourrir, le soigner, l’identifier, le stériliser… Cela ne permet pas aux futurs adoptants de se responsabiliser face à cet engagement. Et s’ils ne l’ont pas payé, alors ils pourront plus facilement le jeter dehors s’il ne correspond plus à leurs attentes. S’il est malade, ils ne le soigneront pas plus… », met-elle en garde. Alizée Fouquet, présidente de l’association Un Ami O’Poil, complète : « Avoir un animal, ça demande de l’argent. Si on n’est pas prêt à mettre 150-200€ dans des frais d’adoption qui couvrent toute une mise en règle, qu’en sera-t-il au moment de payer la facture vétérinaire (surtout vue la hausse des prix) ? C’est encore moins logique finalement de réaliser ce genre d’opération sur certaines “catégories” d’animaux, puisque ce sont généralement les seniors ou les malades qui coûtent le plus cher… »
Le cas particulier des animaux âgés
Pour éviter que les pathologies liées à l’âge (arthrose, cataracte, otites récurrentes, etc.) ne soient un frein aux adoptions, la Fondation Trente Millions d’Amis a mis en place « l’opération Doyen » à partir de 2015, visant spécifiquement les animaux âgés de 10 ans et plus. Il s’agit d’une aide financière octroyée, initialement, aux adoptants de chiens âgés parmi les refuges partenaires de la Fondation. Depuis 2024, cette aide est passée de 600 à 800 euros pour tenir compte de l’inflation et a été étendue aux chats. Afin que les personnes s’engagent en toute connaissance de cause, la Fondation teste également une nouvelle mesure : la réalisation d’un bilan sénior*. Ce bilan médical, préalable à l’adoption de doyens, est financé à hauteur de 150 euros (analyses sanguines et urinaires) afin de révéler d’éventuelles pathologies. Si des opérations lourdes sont à prévoir, la Fondation peut financer sur devis certaines interventions, en plus de l’enveloppe de 800 euros déjà prévue.
Concernant les frais d’adoption appliqués dans le cadre de l’opération Doyen, plusieurs cas de figure existent. La majorité des refuges demandent une contribution de 50 euros, mais une petite minorité applique des frais d’adoption classiques, afin de maintenir un certain niveau d’engagement de la part de la future famille. Dans quelques cas, seule une participation libre est proposée. Il s’agit d’animaux dont on sait qu’il ne leur reste que peu de temps à vivre. « L’urgence est de les sortir du refuge pour les placer en famille. La question des frais d’adoption est ici différente car les personnes qui s’engagent à accueillir ce type d’animal font déjà preuve d’une grande volonté et sont dans une démarche de sauvetage », précise la Fondation 30 Millions d’Amis.
Pour cette dernière, la question de la suppression des frais d’adoption peut ainsi se justifier dans certains cas : « Chacun fait comme il peut pour sauver la vie des animaux, quitte à le faire gratuitement, mais les conditions de placement doivent être les mêmes pour tous les animaux. Il faut nécessairement rester vigilant au choix des adoptants quelle que soit la situation d’urgence. Le bien-être animal doit toujours prévaloir. »
*Pour l’instant, le bilan sénior concerne 15 refuges partenaires sur 260.